
Marges | Jérémie Lenoir
Cette première exposition de l’artiste au sein de la galerie regroupe les séries « Dust » et « Lander », réalisées respectivement entre 2015 et 2017 et entre 2017 et 2021.
Conjuguant une recherche sur l’entropie des paysages contemporains et une expérimentation du médium photographique, « Dust » est un projet que Jérémie Lenoir a mené à Salt Lake City, aux États-Unis. En écho à la Spiral Jetty de Robert Smithson, cette série parcourt la frontière entre l’eau et la terre tout autour du lac salé, là où s’installent les exploitations humaines de sodium, magnésium, potassium et pétrole. Toujours avec le même protocole de réalisation, toujours sans retouche, le corpus se veut résolument plus abstrait et explore pour la première fois la couleur. Les formes sont composées par les machines ou les écoulements, alors que les teintes et leur saturation sont l’œuvre d’algues, de micro-organismes ou d’additifs accélérateurs d’évaporation. Revendiquant une véritable confusion avec le dessin ou la peinture, « Dust » nous met face à la dissolution du vernaculaire dont nos territoires sont les premiers témoins.
« Lander », projet réalisé le long des 1200km du Rhin, de sa source au Lac Constance à son estuaire à Rotterdam, affirme son ancrage dans le réel, reprenant le même protocole et se focalisant notamment sur l’extraction, le transport, le stockage et l’utilisation du charbon et des minéraux. La série renouvelle et affine l’écriture photographique de l’artiste, puisant dans un symbolisme conversant presque avec le spirituel. Dans un dialogue entre réel et chimères, présence et absence, recul et abandon, les images revendiquent un parti pris artistique radical proche du noir et blanc et questionnent notre capacité à regarder, comprendre et s’approprier nos paysages. Alors que voyons-nous ? Des silex en macro ? Les rides d’une main ? Des icebergs à la dérive ? Nous projetons dans ces oeuvres nos propres références artistiques comme notre vision d’un monde enfantin, onirique, scientifique ou purement sensoriel… nous y lisons des cosmogonies multiples que Jérémie Lenoir nous invite à décrypter, convaincu de l’impérieuse nécessité de créer, par l’imaginaire, une intimité avec le monde qui nous entoure.